Telle est la question que nous a posée notre ami Martin, salarié contraint à la rigolade par son entreprise.
Il y a quelques jours, nous étions invitées à dîner chez Martin. Comme c’est notre copain, il est au courant que nous avons sorti un bouquin sur l’humour. Mais, à peine avions-nous franchi sa porte, qu’il nous expliquait qu'on est bien mignonnes avec notre “Faites l’humour dès le premier soir”* mais que lui, il n'en peut plus.
*merveilleux livre co-écrit à quatre mains (tout comme cette newsletter) chez First Editions.
Il nous a alors raconté que, dans son entreprise, l'humour est devenu un impératif. Pour être considéré comme un bon élément, performant, charismatique, il est OBLIGATOIRE de rire ou de faire rire. On l’a écouté, perplexes, et on s’est demandé comment on en est arrivé là ? Pourquoi l’humour est-il devenu une contrainte ?
Pas facile, par les temps qui courent, de rigoler pendant 1 km...
Martin travaille dans une entreprise qui s’est dotée d’un babyfoot et d’un “Happiness Manager”. C’est la start-up way of life qui a infusé jusqu’au CAC 40. Dans la boîte de Martin, il FAUT se sentir bien, il FAUT aller bien. Car un salarié heureux est un salarié productif. Eh oui (spoiler alert), figurez-vous que le salarié est un humain comme les autres, il préfère qu’on le traite bien (c’est quand même vachement basique un salarié ! 😜).
Or, quoi de mieux que l’humour pour une bonne ambiance de travail ?
Rien.
A part peut-être le mi-cuit au chocolat.
Le problème c’est quand ledit mi-cuit arrive après un apéritif dithyrambique, deux entrées, une viande, un poisson et du fromage ! Vous nous direz : “Mais enfin QUI sert encore des dîners aussi copieux de nos jours ?”. Nous vous répondrons : “Martin”. Voyant arriver sur la table le fameux mi-cuit au chocolat accompagné d’un étonnant combo crème anglaise, chantilly, sauce au chocolat-cacahuètes et noix de pécan caramélisées, nous nous écriâmes in petto : “Trop c’est trop !”.
Mais, pour ne pas vexer notre hôte, on n’a pas osé refuser, on a souri et on s’est forcées.
En rentrant chacune chez nous, après 3 Alka-Selzer, on se dit que c’est à peu près cette sensation que Martin doit éprouver dans sa boîte. Lui qui, après avoir géré les affaires courantes, participé à 4 réunions (dont une visio en hongrois sous-titrée par Chat GPT), mis à profit son heure de déjeuner pour régler un dossier en souffrance et versé son obole pour le départ “vers de nouvelles aventures” de Sylvie (qu’il a dû croiser deux fois à la cafét’, mais impossible de refuser), doit encore briller lors de l’afterwork (devenu obligatoire depuis l’arrivée de Jean-K, chargé du bonheur au travail de l’entreprise).
Voilà à peu près l'état dans lequel on était en sortant de notre dîner chez Martin...
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